Villa
Svéa le 21 Juin 1916
Mon enfant bien aimé
Je passe à Svéa cette dernière
journée où je ne suis pas ; toute en pensée auprès de toi. Je ne me
doutais pas en ces deux journées paisibles sur la côte, que tu étais toi dans
cette effroyable tourmente et je m’en veux de ce court moment de douceur où
prtant aucune de mes peines de m’a abandonnée et je n’ai rien de toi
aujourd’hui venant de Cette.
J’y arriverai cette nuit, peut être
aurai-je la douceur de trouver un mot de toi. Il a du se perdre de tes lettres
certainement. Tante Fanny sait par moi que tu as reçu son argent mais pense
qu’une lettre à son adresse a du se perdre aussi car elle te demandait
l’adresse du brave poilu que tu lui as recommandé et à qui elle voudrait
envoyer un paquet et elle ne l’a pas. Veux-tu peux-tu la lui donner ?
Tante Berthe m’a donné pour toi le
manteau d’officier d’oncle Marc. Je l’emporte à Cette pr le soigner. Dis-moi,
tout ce dont tu as besoin je t’en supplie. Annie et Jane t’envoient
d’affectueuses choses. Tante Fanny sa tendresse et moi que t’envoyer d’assez
tendre mon Jean bien aimé ? En tous cas l’assurance que le cœur de ta
triste maman est tout là bas au milieu de la mitraille. Si je savais où te
chercher ! dans quel coin de la région terrible.
Je pense que tout va bien à Cette,
il me tarde maintenant d’y être.
Je t’embrasse avec toute mon âme.
Ta mère