Maman cherie
Je viens de passer avec oncle
Georges une vraiment bonne journée. Je suis parti de mon village assez tôt pour
le ceuillir ici à la sortie de son train. Doddy Mourgue [Edouard Mourgue-Molines], médecin auxiliaire dans
le même G.B.C., l’accompagnait.
Nous avons passé quelques trop courtes
heures à parler des absents et un peu de nous-même. Il comprend parfaitement que tu aies eu le
cafard à Saverdun et trouve tout naturel que tu sois retournée à Cette. Il a
été très affectueux et attentionné, m’a payé une pipe neuve, des cigares, m’a
bourré de gateaux et m’a payé un bon repas à la Haute Mère Dieu. C’est toujours
le même type plein de cœur et un peu gosse.
Nous avons commencé la journée par
un bain puis nous avons couru les magasins. Il s’était chargé de 1000
commissions pour son chanoine, son rabbin, son pharmacien, etc. Nous avons
rencontré dans la rue Mr Keller, gendre de Mr Schloesing,
capitaine d’arti. et plus loin Jean Lauga, aumonier d’un corps voisin. Je le
connaissais déjà pour l’avoir vu dans des congrès. Oncle Georges est un peu
outré de le voir dans un costume tout ce qu’il y a de plus « bleu
horizon » equipé, couvert de croix, de galons de de brisques[1].
C’est évidement un peu ridicule et ça doit nuire un peu à son ministère. Mais
je sais que c’est au fond un type epatant et très devoué. Après le diner un
ss-lieut. d’arti, Toulousain, très sympatique, paroissien de fortune d’oncle
Georges est venu nous trouver.
Mourgue est toujours le même garçon à
l’air jeunet. Ma permisson étant de 24 h, je vais pouvoir coucher ici ce soir
et passer une nuit ds un lit ce qui ne m’est plus arrivé depuis longtemps.
En attendant je vais faire mes
emplettes.
Oncle Georges parti il me semble que
je viens de rever ; ces heures où l’on est entouré d’affection passent
bien rapidement.
Je pense à vous tous et vous
embrasse tendrement.
Jean
[1] Galons,
chevrons.