Villa
Svéa le 30 Mars 1916
Mon enfant chéri,
J’ai à l’instant ta carte du 24
venue de Cette, je n’ai plus rien reçu directement [mot illisible] à Marseille. Tu es sur le point de quitter
ce séjour ou tu as eu un peu de repos d esprit, un calme relatif, la
sécurité et me voilà replongée dans les transes et les soucis.
Ici la vie est fort agitée et ns
regrettons avec Suzie notre vie paisible et calme et reposante du vrai home.
Elle me faisait la réflexion que l’intimité du home manque ici totalement. On
s’installe difficilement. Il ne fait pas très beau et on ne peut vivre au
jardin. Petite recrudescence de froid.
Na vit en souveraine ; elle a
une cour autour d’elle qui la regarde vivre, dormir, teter et prendre ses
bains. Son petit corps tout potelé est adorable et ses yeux noirs si vifs font
époque.
Je me demande si je pourrais être
longtemps ici. La maison est pleine, on sent qu’on dérange plutôt ; Axel [Busck] a du monter au second. Eliane [Houter,
la petite-fille, âgée de 10 ans, d’Axel et de Fanny Busck] couche sur un matelas par terre tout cela est ennuyeux pour nous.
Je suis fort ennuyée que tu n’aies
pas de lit. J’aurais tant aimé que tu puisses te délaisser aisément. Mon pauvre
cher enfant.
Je viens de voir Mme Girbal1,
son fils est aussi en Champagne, mais je ne sais plus ou ? Je me hâte pour
que partent ses lignes. Tendresse de tous et de ta mère toute son affection.
Math P Médard
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1 Jeanne Laurens (1864- ?), épouse de
Jules Girbal (1864-1923), pasteur à Marseille. Parents d’Auguste
Girbal (1892-1918).