Je fais popote
avec les officiers de la compagnie et le capitaine Baudin, qui fait fonction de
chef de bataillon depuis que le commandant Girard a été fait prisonnier avec le
54. Girard était populaire, Baudin ne l’est pas. Il a travaillé avant la guerre
pour le 2ème bureau en Allemagne et il a pris les manières raides et
froides d’un officier prussien. Je n’ai pas personnellement à me plaindre de
lui. C’est lui qui m’a proposé pour cette citation. Il me donne lui-même des
leçons d’équitation : « Un officier doit savoir monter à
cheval ».
Malheureusement il a eu pendant mon absence une altercation avec Toussaint. Il lui a flanqué huit jours de prison et n’admet pas que je le prenne comme ordonnance. Toussaint est le genre d’homme qui supporte mal l’autorité telle que l’exerce le capitaine. A la suite de je ne sais quelle histoire Baudin lui a donné un coup de pied dans le derrière, à quoi Toussaint a répliqué : « Mon capitaine, ma famille est sous la botte allemande et moi sous la française ».
Cette hostilité aurait pu finir par amener Toussaint en conseil de guerre, si le commandant Rivals qui devait prendre après le commandement du bataillon n’avait compris tout de suite à qui il avait à faire. Plus tard lorsque le capitaine Baudin aura été blessé et évacué, il prendra Toussaint dans l’équipe d’agents de liaison, où ce dernier donnera toute sa mesure.
Cette hostilité aurait pu finir par amener Toussaint en conseil de guerre, si le commandant Rivals qui devait prendre après le commandement du bataillon n’avait compris tout de suite à qui il avait à faire. Plus tard lorsque le capitaine Baudin aura été blessé et évacué, il prendra Toussaint dans l’équipe d’agents de liaison, où ce dernier donnera toute sa mesure.
Je prends comme ordonnance un paysan du Vaucluse, Ouvier, un ancien « écusson jaune » un petit méridional maigre avec une figure de vieille femme et un accent bien tassé. Il sera pour moi jusqu’à la démobilisation le dévouement personnifié.
Mémoires de Jean Médard, 1970 (3ème partie : La guerre)
Mémoires de Jean Médard, 1970 (3ème partie : La guerre)
Albert Jules Charles Toussaint (1890-1918)
Toussaint
est évoqué à plusieurs reprises dans les mémoires de Jean Médard, en
particulier :
- le 16 juin 1916 (les deux
derniers paragraphes) ;
- le 20 juin 1916 (troisième paragraphe).
Mais les indices concernant son identité sont
minces : son prénom, en particulier, n’est jamais mentionné. Heureusement,
Jean Médard a noté sur son carnet le nom de la commune d’origine de Toussaint :
Haybes, dans les Ardennes.
Cette
indication permet de remonter le fil, grâce à l’arbre de Dominique Paulus, en
ligne sur Généanet :
Après ces souvenirs de l’été 1916, jamais plus Jean
ne mentionnera Toussaint, que ce soit dans la correspondance ou dans les
mémoires. Sans doute n’a-t-il jamais su ce qu’il était advenu de lui.
Sa fiche
matricule indique qu’il a été placé en « sursis d’appel » le 2
octobre 1917 « au titre des mines du Blaymard », c'est-à-dire affecté à un poste où ses compétences professionnelles étaient nécessaires.
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