Plélo,
25 octobre 1915
Maman cherie
Je viens de recevoir ta bonne lettre
du 21. C’est triste que Suzon se remette si lentement. Si je suis privé d’amis
et d’affection au regiment, je me suis très bien dedomagé ces deux derniers
jours en allant voir J. [Jean] Lichtenstein
à Roscoff. A l’allée, je me suis arrêté une heure à Guingamp voir Babut, le
volontaire[1]
qui a eu une commotion cerebrale. Il a l’air encore assez surexité et souffre
de la tête. J’ai peur qu’il reparte insuffisament gueri ; et sa pauvre
mère qui a deja perdu deux fils, et vois partir ou repartir les deux
autres !
Jean Licht. m’attendait à la gare
Samedi soir à 8 h. Il n’est pas très bien : tousse, se voute et surtout ne
se soigne pas. Mais c’est un bien chic type. Nous avons passé ensemble une
delicieuse journée ; le pays était beau, mais au second plan, tant ns
étions à la joie de nous revoir. Il souffre beaucoup de la solitude. Depuis Mai
j’étais le premier parent ou ami qu’il revoyait – et surtout de son inutilité
militaire. Il a tout fait pour partir, en vain naturellement et il se ronge. Il
travaille beaucoup, son moral est très bon : une belle nature. Nous sommes
partis ensemble pour Morlaix où ns avons fini l’après-midi. Petite ville interessante.
Je me suis arreté à Guingamp au retour et j’ai diné chez les Bruneton. Retour à
minuit sous la pluie.
Reçu lettres d’oncle Fernand [Leenhardt] et tante Elise [Médard épouse
Drouillon], de [Albert] Dartigue, [Daniel] Loux, [Paul] Conord, etc.
Bien tendrement à toi,