dimanche 25 octobre 2015

Plélo, 25 octobre 1915 – Jean à sa mère

Plélo, 25 octobre 1915
            Maman cherie 

            Je viens de recevoir ta bonne lettre du 21. C’est triste que Suzon se remette si lentement. Si je suis privé d’amis et d’affection au regiment, je me suis très bien dedomagé ces deux derniers jours en allant voir J. [Jean] Lichtenstein à Roscoff. A l’allée, je me suis arrêté une heure à Guingamp voir Babut, le volontaire[1] qui a eu une commotion cerebrale. Il a l’air encore assez surexité et souffre de la tête. J’ai peur qu’il reparte insuffisament gueri ; et sa pauvre mère qui a deja perdu deux fils, et vois partir ou repartir les deux autres !
            Jean Licht. m’attendait à la gare Samedi soir à 8 h. Il n’est pas très bien : tousse, se voute et surtout ne se soigne pas. Mais c’est un bien chic type. Nous avons passé ensemble une delicieuse journée ; le pays était beau, mais au second plan, tant ns étions à la joie de nous revoir. Il souffre beaucoup de la solitude. Depuis Mai j’étais le premier parent ou ami qu’il revoyait – et surtout de son inutilité militaire. Il a tout fait pour partir, en vain naturellement et il se ronge. Il travaille beaucoup, son moral est très bon : une belle nature. Nous sommes partis ensemble pour Morlaix où ns avons fini l’après-midi. Petite ville interessante. Je me suis arreté à Guingamp au retour et j’ai diné chez les Bruneton. Retour à minuit sous la pluie.
            Reçu lettres d’oncle Fernand [Leenhardt] et tante Elise [Médard épouse Drouillon], de [Albert] Dartigue, [Daniel] Loux, [Paul] Conord, etc.
Bien tendrement à toi,

J. Médard

[1] Membre du mouvement des « Volontaires du Christ ».