samedi 3 octobre 2015

Paris, 3 octobre 1915 – Jean à sa mère

Aspirant Médard
Depôt du 132ème d’Inf.
Châtelaudren (Côtes d’Armor)
Paris, 3 Octobre 1915
Maman cherie, 

J’arrive à Paris après un excellent voyage, pas fatigant. N’ai pas trouvé à la fac. Mme Monnier encore en Suisse, et à la rue de Rivoli oncle Louis absent. Il parait qu’il est très serieusement malade et se soigne chez son ami Renaud ds la Gironde. Je ne manque pas d’oreillers où reposer ma tête, je vais en trouver à la sortie de l’Oratoire [temple parisien] où je me réjouis d’entendre Wilfred [Monod].
Bien tendrement à vous tous.
Jean           

 
Flashback 

Le Dimanche matin je participais au service religieux dans un des temples de Paris. J’ai dû fréquenter tous les temples réformés et entendre tous les pasteurs protestants de l’époque. Mes préférences allaient alors à Wilfred Monod et à Charles Wagner. […]
[Année 1910-1911, Louis-le-Grand]

C’est Wilfred Monod qui exerçait sur nous la plus forte influence spirituelle. Nous aimions mieux ses méditations ou ses sermons que ses cours. La génération suivante lui a reproché à juste titre, mais d’une manière injustement cruelle le flou de sa pensée, son idéalisme, une recherche prétentieuse de mots rares, que sais-je encore. Je n’oublie pas quant à moi qu’il a ouvert plus que tout autre mes yeux de jeune bourgeois aux injustices sociales et aux folies du nationalisme.
[Année 1913-1914, faculté de théologie de Paris]
  
Mémoires de Jean Médard, 1970 (2ème partie : Enfance et jeunesse)