La photo est légendée "Domino été 1914". Il est improbable qu'elle date du 2
août. Le jeune homme à droite n'est pas Charles Grauss.
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Quelques
campeurs avaient déjà quitté le camp
pour rejoindre leur foyer lorsqu’a éclaté le 2 Août l’annonce de la
mobilisation générale. Ce fut le jour du départ de tous les aînés,
mobilisables, obligés de laisser la responsabilité et la liquidation du camp à
quelques lycéens ou très jeunes étudiants.
A
la fin du repas de midi avant la dernière séparation, Grauss ne fit pas de
discours mais se contenta de lire quelques passages des adieux de Jésus à ses
disciples dans l’Evangile de Jean et le récit de l’institution de la Sainte
Cène. Nous avons rompu notre pain et bu notre vin sans qu’il n’y ait aucune
célébration rituelle et pourtant aucun service de communion ne m’a jamais
laissé une impression aussi profonde.
Interminable
voyage jusqu’à Sète dans un train de mobilisés. Ces derniers, en tout cas dans
le Midi, ne montraient aucun enthousiasme. Ils étaient fatalistes et inquiets,
moins bavards qu’à l’ordinaire. Deux jeunes pourtant dans mon compartiment se
montraient assez excités. Un spahi, qui revenait du Maroc, me dit en haussant
les épaules : « Ils ne savent pas ce que c’est. »
Mémoires de Jean Médard, 1970 (2ème partie : Enfance et jeunesse)