26/5/1917
Maman chérie
Nous voici installés plus loin
encore du front. Nous entendons à peine le canon. Le village quoique très
proche des anciennes lignes a très peu souffert et comme la plupart des
villages de la region – qui devait être delicieuse en temps en temps de paix –
c’est un nid de verdure et de fraicheur. Ça n’empêche pas les heures chaudes de
la journée d’être chaudes car maintenant c’est carrement la chaleur. J’ai
quitté ce matin la popote du colonel pour celle du 3ème bataillon où
j’ai été acceuilli très amicalement. Le Cdt de Cie, de
Benedetti est un corse, gentil mais assez insignifiant. Mais nous faisons
popote avec tout le bataillon et c’est une popote très sympatique présidée par
le commandant Jules, un vieux colonial.
Je vais probablement me promener
d’une compagnie à une autre, ce qui est un rôle pas très interessant, mais,
comme je garderai probablement mon role d’officier de liaison chaque fois qu’on
sera en secteur, on trouve inutile de me redonner ma section qui passerai en de
nouvelles mains au moment de remonter au feu, ce qui serait une mauvaise chose.
J’ai le cœur gros d’abandonner mes poilus, mais je n’ai pas insisté pour retourner
à la 5ème. Le capitaine Fauveau n’y a pas reussi, et mon role y
serait assez difficile. Pauvre 5ème !
Je te quitte, Maman chérie, et
t’embrasse bien affectueusement.
J. Médard
Source : JMO du 132ème
R.I. - 26 mai 1917 |