11/5/1917
Maman chérie
C’est vrai que je t’écris des
lettres laconiques. Il ne m’est guère possible pour le moment de faire
autrement.
Je suis detaché depuis deux jours à
l’Etat Major de l’Infanterie.
Actuellement c’est la nuit. Je
prends mon quart de veille au téléphone ou pour n’importe quoi. C’est le seul
moment calme de la journée. Mais le quart est moins dur qu’en première ligne,
je t’assure C’est presque le confort ; tout à l’heure je vais trouver
presque un lit.
Source : collections BDIC |
Au regiment rien de nouveau. Nous
esperons que la relève n’est pas trop lointaine, mais on ne sait jamais.
Ce qu’il y a de plus embetant ici
c’est une agitation ahurissante Au bout de quelques jours de ce regime on ne
sait plus ce qu’on fait. Je te parlerai plus tard de mes compagnons de l’heure.
J’ai eu de bonnes nouvelles de [Albert]
Léo par sa femme [née Madeleine Bouffé]. Sa plaie est un peu infectée mais en
somme en bonne voie. Mlle [Léo] Viguier qui était restée encore un
long temps sans nouvelles de Westphal en a reçu de nouveau. Bonne lettre de
Jean Lichtenstein.
J’ai beaucoup entendu parler du
livre de [André] Cornet-Auquier dont tu me parles[1].
J’espère pouvoir le lire en son temps. Pour le moment je vis un peu au jour le
jour, comme une bête. Ce petit bavardage avec toi est le seul vrai delassement
et c’est bien doux quoique très incomplet.
Très tendrement
Jean
[1]
Un soldat sans peur et sans reproche,
ouvrage publié en 1917, composé d’extraits de la correspondance du capitaine
Cornet-Auquier (1887-1916) et du discours, prononcé lors du service funèbre au
temple de Châlons-sur-Marne, par le pasteur Henri Gambier.