dimanche 11 novembre 2018

Marseille, 11 novembre 1918 – Mathilde à son fils

Villa Svéa, ce 11/XI 1918

Mon aimé

La voici l’heure de la belle, la grande victoire. Je ne puis croire à ce bonheur. Mon âme ardente de reconnaissance monte vers celui qui m’a dit : Ils reviendront du pays de l’ennemi il y a de l’espérance pr toi et il tient ses promesses !

Mon fils reviendra !! Tu peux t’imaginer mon fils ce que cette pensée me bouleverse de bonheur et pourtant cette maison où l’on devait être en liesse le jour d’aujourd’hui est sombre et triste et ns n’avons pas été en ville qui est parait-il dans le delire. Tout ce matin ns avons entendu l’écho de toute cette effervescence.

Les cloches ont carillonné à l’envie, les sirènes ont crié, le canon a tiré. Mais pr cette fois le bruit en était reconfortant et doux….

Ce soir grande illuminations [mot illisible] defiles, envoi de fleurs.

Une [mot illisible] est de ne pas savoir où te chercher, de ne pas savoir où tu te réjouis. Une ombre plane sur tout ce bonheur le souvenir de tous ceux qui ont donné leur sang pr cette victoire. Ceux qui sont tombés à la dernière heure ! quel affreux malheur. Que Dieu est bon de t’avoir ramené mon enfant chéri. Je puis mourir maintenant puisque je vis cette heure.

On dirait qu’Elna le comprend. Elle parle d’armistice, de victoire. Elle joint ses mains en disant : Merci Bon Dieu d’avoir gardé oncle Jean. Dis bon mère il revient ce soir oncle Jean ? Puis [mot illisible] oncle Jean revient tu sais je te le ferai voir il est beau oncle Jean et je l’aime.

Je t’embrasse éperdument. Pour cette fois n’en prend pas ombrage. Que Dieu te garde encore.

Ta maman
Math P Médard
Elna

Elna dit qu’elle signe la paix.

"Elna dit qu'elle signe la paix"
Lettre de Mathilde à Jean Médard, 11 novembre 1918
Rappel : Elna Ekelund était alors âgée de 3 ans, d'où ce tracé hasardeux...