Cette 18 juillet 1915
Mon chéri,
J’ai reçu hier ta bonne lettre et en ai eu
une vraie joie car tu es maintenant aussi avare de ta prose pr ta maman que pr
les autres. Je m’en suis aperçue. Le pauvre [Daniel] Loux en est, tu le sais, tout
malheureux. Tu vas d’empresser je suis sûre, de remercier ta sœur de ses bonnes
truffes et de la pensée qui a dicté cet envoi et tu écriras un peu à ton ami,
car maintenant c’est de la paresse pure chez toi. Comme je me suis réjouie de
cette course en auto quelle aubaine pr toi ! mais il eut été préférable
que la promenade fut dirigée d’un autre coté puisque tu connaissais celui là.
J’ai eu hier un mot de tante Elise [Médard épouse Drouillon], me
grondant d’avoir tant tardé à lui donner
ton adresse à Aix où elle t’aurait déjà écrit. Elle me demande des tuyaux pr
aller te retrouver (Adresses d’Hôtel) car, me dit-elle, elle a grande envie
d’aller t’embrasser. Je ne sais quel Hôtel lui conseiller, tu pourrais chercher
un peu ou demander des renseignements.
J’ai enfin fait partir ton paquet. Les
pantalons avaient besoin d’une petite réparation et Alice tardait à les
repasser, voilà prquoi tu ne les as pas encore. Je n’ai pas songé à laver les
souliers assez tôt. Je joins au paquet du savon blanc à la magnésie et une
brosse.
Source : Mémoire des hommes - Fiches "Morts pour la France" |
Longue lettre de Tante Jeanne [Médard épouse Beau] à Suzie. Te
l’ai-je déjà dit ? elle voit tomber son dernier espoir. Les nouvelles
reçues des Dardanelles lui enlèvent jusqu’au dernier [son fils Maurice Beau, le
cousin de Jean, y était en effet mort le 2 mai 1915]. Pauvre Jeanne quelle vie éprouvée sur le declin des jours ! elle
était encore si heureuse quand, moi, j’eus ma vie brisée. Et cependant, il y a
déjà longtemps qu’oncle Emmanuel [son mari] se charge de troubler son horizon.
Je coule des heures douces et bien
calmes ; tout à fait charmantes si tu étais là. Ta sœur extremement
bienveillante ; elle va, vient, elle coud surtout et je me rejouis de le
faire aussi à ses côtés.
Aujourd’hui, Dimanche, ns sommes
particulièrement tranquilles. Hugo, très absorbé, songe, calcule, écrit.
Maintenant, il arrose son jardin et je vais aller avec ta sœur voir un peu
tante Anna.
Alice vient de nous quitter pr aller passer
trois ou quatre jours à Montagnac mettre un peu d’ordre dans ses affaires. Elle
sait qu’elle ne peut y aller en Septembre [après la naissance du bébé de Suzie] et Suzie a tenu à ce qu’elle ait ces
quelques jours. Du reste Maurice [Bouirat] son neveu se marie Samedi et elle se hâte pr
ne pas être là au mariage. Je vais donc être un peu plus occupée des jours ci
Tu es en train de manger ta soupe. Je te
suis autant qu’il se peut heure par heure. Sors-tu le matin ? As-tu des
livres ? Fais tu tes frictions [?] ? et te fait on encore tes piqûres. [mot illisible] je te quitte pr aller à la villa Frisch voir
ces dames. Tante Anna est effrayante de maigreur. Ce sejour en Normandie lui
fera du bien.
Mille tendresses mon cher enfant d’une maman
qui te cherit. Amitiés de tous.