dimanche 4 mars 2018

Belfort, centre d’instruction des liaisons, 4 mars 1918 – Jean à sa mère

4/3/18

Ma chère Maman

Me voici à B. [Belfort]. J’ai quitté mon escadrille après dejeuner profitant d’une auto qui m’a conduit à destination. Neige. Routes effroyables.

Ici j’ai suivi le conseil qui m’était donné de m’installer à l’hotel ou moyenant un petit supplement à mon billet de logement je serai plus independant et certainement chauffé. Je serai donc materiellement aussi bien que possible.

Une deception m’attendait, et aussi un veritable joie. La deception c’est que le cours sera plus long que ce que je pensais. Il ne finira pas avant le 25 Mars.

La joie, c’est la rencontre sur le trottoir de Frank Suan, élève à la maison des missions, un bon ami de Paris, actuellement sous lieutenant de chasseurs et instructeur pour le canon de 37. C’est une des nombreuses cellules du système de cours qui fonctionne ici, car il faut te dire que le cours de radiotelegraphie n’est que la centième partie de ce système. On dit que actuellement la moitié de l’armée française suit des cours, et l’autre moitié en donne. Je vais d’ailleurs faire une demarche pour suivre au lieu du cours de radiotélegraphie le cours de liaison telephonique qui sera beaucoup plus à ma portée, et me sera beaucoup plus profitable.

Avant de quitter L. [Luxeuil-les-Bains] j’ai enfin reçu trois lettres de toi et d’autres qui s’étaient accumulées au 132.

Jusqu’à nouvel ordre, ecris moi à l’adresse suivante

J. Médard
S/lieut au 132e R.I.
Centre d’Instruction des Liaisons
s.p. 101

Pardonne-moi les déceptions successives que je t’ai donné avec ma permission. Ne parlons plus de cette dernière. Et dis-toi bien que ces jours-ci je suis aussi bien qu’on peut l’être aux armées.

Tendrement.
Jean