dimanche 10 décembre 2017

Willer-sur-Thur, 10 décembre 1917 – Jean à sa mère

10/12/17
            Ma chère Maman 

            Je ne t’ai pas écrit depuis ma visite à Guy Leenhardt. Avant-hier après-midi je suis allé le retrouver dans un village voisin qu’il devait quitter le lendemain. C’était une occasion à saisir par les cheveux.
            Il était en train de monter la garde bravement devant le poste de police. Il m’a fait très bonne impression. Il peut se classer dans la subdivision Leenhardt-Westphal : une belle santé physique et morale, une manière agreable de se presenter et de parler. J’espère ne pas rester trop longtemps sans le revoir. Dans le même village j’ai trouvé Jean Monnier qu’il a connu ds la Drôme. J’ai fait une partie de la route du retour avec lui, tandis qu’une longue file de camions nous depassait et nous éclaboussait.
Source : collections BDIC
            Hier je suis allé à Th. [Thann] au temple. [Albert] Dartigue a été tout à fait epatant, un veritable sermon de Féderation. Sur texte : « Quand le Christ reviendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? ». On retrouve toujours à ces cultes du dimanche les mêmes têtes sympathiques, Mme Scheurer [Marie Anne Dollfus, épouse Scheurer], Mme Lauth [Berthe Scheurer, épouse Lauth], le Cdt [Etienne] de Seynes, etc.
            Nous traversons une periode de temps froid mais splendide, les heures du milieu de la journée sont presque chaudes à force d’être ensoleillées.
            Ma vie à moi est toujours aussi peu interessante. Mais je suis decidé à ne me laisser m’attrister ni troubler par cette fausse position. C’est bien difficile d’être à la fois prudent comme le serpent et simple comme la colombe[1].
            Je t’embrasse, maman chérie, toi et les chers petits et les chers grands qui t’entourent. 

Jean

[1] Mathieu 10.16 : « Voici, je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme les serpents, et simples comme les colombes. ». On n’est pas étudiant en théologie en vain.