Châtelaudren
10 Decembre 1915
Maman cherie
Ma première pensée en arrivant ici
est pour toi. Je n’ai encore vu personne et n’ai aucune idée sur la date du
depart. Un bon voyage a terminé ces bonnes journées de paix et d’intimité. Hier
matin je suis arrivé à Paris avec 2 heures de retard. J’ai pu quand même
laisser mes affaires à la fac et courrir rue de Trévise pour prendre
rendez-vous avec tous les amis. Dejeuner à la faculté presidé par Madame [Suzanne] Monnier, toujours aussi gentille, table
bien vide. J’ai manqué de trois jours [Edmond] Mercier, et de 2 jours [Charles] Grauss en permission. Après dejeuner j’ai courru ches les W. [Wilfred] Monod avec qui j’ai encore pu passer une
bonne heure. De là, rue de la Faisanderie, j’ai été reçu avec une cordialité
qui m’a touché, suis resté assez longtemps. Elle [Aline Ménard-Dorian, une
tante de Jean] m’a embrassé en me disant
adieu et m’a donné des « pastilles à la kola ». Tu seras contente. De
la à au cercle des etudiants où j’ai passé la soirée avec plusieurs amis reunis
par Mlle [Léo] Viguier, [Roger] Jézéquel, Charles Westphal, [Frank] Suan, Mlle Kellermann etc. Diner
à la faculté. A la gare Montparnasse j’ai encore trouvé Mlle Viguier
toujours fidèle, et me voici, encore un peu abruti par le voyage.
Je t’embrasse tendrement
Jean
Comment
va oncle Charles [Scheydt] ? J’ai
toujours devant les yeux le sourire de la petite.