Villa
Svea le samedi [donc
le 7 Novembre 1914]
Mon cher fils,
Mon séjour s’est prolongé d’un jour
à l’autre espérant tjours quelque chose sur ton sort nouveau. J’espérais bien
partir aujourd’hui mais je me suis comme laissée retenir jusqu’à lundi parce
que je sens vraiment le bienfait que je retire de ce temps de repos. De plus,
oncle Marc est tombé malade Jeudi : il a une bonne bronchite et je me fais
un devoir d’aller le voir tous les jours.
Il a reçu hier ta bonne carte. J’ai
été bien heureuse que tu aies écrit.
J’ai eu hier une lettre de Suzie
contenant aussi une lettre de votre tante Jeanne [Beau] adressée à ta sœur. Je te
l’enverrai si ta sœur ne me demandait de la lui garder. Voici du reste
textuellement ce que dit Eugène à ses parents : Blessé le 19 Août je fus
fait prisonnier. Ma blessure est guérie. Je me porte très bien et souhaite
qu’il en soit ainsi pour vous. Donnez-moi des nouvelles. Tout en nourrissant
avec ferveur l’espoir de vous revoir je vous embrasse bien affent.
Votre Eugène qui pense bien souvent à tous les habitants du Plan.
Eugène Beau
Source : Sébastien Ertz, collection particulière ©
Henri Ertz (1891-1932), sergent au 4ème BCP et
arrière-grand-père de Sébastien Ertz, était prisonnier
dans le même camp qu'Eugène Beau. C'est à lui
qu'Eugène adressa en novembre 1917 la carte ci-dessus.
Son arrière-petit-fils Sébastien, en cherchant la
trace des camarades de captivité de son aïeul, a
trouvé la mienne et a eu la gentillesse de me
communiquer ce document. Qu'il en soit ici
vivement remercié. Voir aussi la lettre de Mathilde du 25 juillet 1915. |
Adresse : Eugène Beau, sergent au 58e
Verso de la carte ci-contre Source : Sébastien Ertz, collection particulière © |
Adresse : Eugène Beau, sergent au 58e
Kriegsgefangenen, Stall n° 10
Trùppenubùngs platz
Konigsbrück
Saxe Allemagne
Maurice se remet bien de sa
blessure, il est toujours dans un Hôpital de Nice. Ta tante exprime le désir
que tu ne te présentes pas à cet examen les officiers étant plus exposés que
les non gradés.
Cela me donne de nouveaux tourments,
mais enfin il faut mettre en Dieu toute sa confiance. C’est lui qui a dirigé
les évènements puisque je ne soupconnais pas que la chose fut possible. Il peut
te garder. Ce serait trop beau si tu allais à Nîmes. dès que tu sauras quelque
chose avise nous sans tarder.
Je partirai donc seulement Lundi à
quatre heures pr arriver à minuit, c’est le train le plus rapide. Je suis
affublée d’un chien qu’il me faut remettre aux Pastoureau. Il me sera difficile
de le remettre à cette heure là, je devrai donc l’amener à Cette ce qui ne fera
pas la félicité d’Alice. Je revivrai demain nos heures de Dimanche passé et
j’irai au temple sans toi en pensant à toi.
Je t’embrasse mon cher enfant bien
tendrement.
Ta mère affectionnée
Math P.
Médard
Rudy
écrit bien souvent. Il a été envoyé à Bar le duc pr le ravitaillement et a joui
immensément de s’asseoir pr manger à une table d’auberge – il croit ne plus
être capable de vivre une vie civilisée.