19/2/1917
Maman chérie
Hier je t’ai écrit très rapidement,
aujourd’hui je viens te raconter les details que tu desires tant.
Ma visite à Hervé [Leenhardt] :
ça m’a fait faire une petite promenade à cheval sur Abdel-Kader, qui a été très
sage comme il convient. J’ai trouvé Hervé bien installé ds une très jolie
maison. J’ai été très heureux de le revoir, sachant surtout qu’il t’avait vu
peu de jours avant. Mais, c’est drôle, pour aussi gentil qu’il soit, et reussi,
je ne me sens pas en harmonie avec lui comme avec tant d’autres, les Fédérés
surtout, comme avec le petit Chazel par exemple que j’avais vu l’avant-veille
et que je connais si peu pourtant.
Au retour, à la popote, j’ai trouvé
la table toute fleurie. C’était une aimable attention du capitaine [René Candillon]
et de G. [K.G. anonymisé par l’auteur du blog] pour la veille de ma fête. Le
menu aussi était soigné. G. fait des progrès. Le capitaine a su le prendre.
Hier j’ai fait grasse matinée. J’ai
lu des livres que je me suis fait envoyé par Mlle [Léo] Viguier.
L’après-midi, je l’ai passé à la
fête sportive. Hervé [Leenhardt] que j’attendais n’est pas venu. Les joueurs de
foot-ball, les coureurs, les sauteurs, les cycleurs s’en sont donné à cœur
joie, et le colonel, qui fait bien les choses, avait offert aux gagnants de
jolis prix.
T’ai-je dit que c’est par Hervé que
j’ai appris la mort d’Auguste [Lichtenstein]. Je n’étais pas lié avec lui comme
avec Jean [Lichtenstein, frère d’Auguste] ; mais à cause de Jean surtout,
ça m’a fait une grande peine. Quel avenir sombre.
Adieu, Maman chérie, très tendrement
à toi.
Jean