samedi 17 novembre 2018

Marseille, 17 novembre 1918 – Mathilde à son fils

Villa Svéa le 17/XI

Mon chéri

On avait ce matin confié les enfants à une femme de ménage pr que je puisse aller au temple assister au service d’action de grâce presidé par Mr Bruguière. C’était magnifique et poignant. Boudouresque1 a chanté Gloire à la France immortelle Gloire à ceux qui sont morts pr elle. Il y avait des sanglots dans l’auditoire.

J’ai reçu en partant ta lettre du 11 que j’attendais avec une impatience fébrile. Mais enfin tu n’as pas du rester sans m’écrire du 6 au 11 et alors ? Je n’ai plus de nouvelles de toi et chaque courrier apporte une déception. Cependant maintenant on n’a plus de droit de s’inquiéter.

Hélas – il y en a encore qui succombent de la grippe à cette heure ou l’on voudrait vivre. Ceux du moins qui ont tant lutté et souffert.

Ta lettre du 11 est bien intéressante. Quelle journée lumineuse inoubliable. Quelle fête du cœur et de l’âme.

On parle autour de moi. [Édouard] Picard arrive. Je ne sais plus ce que je dis. Je pense à toi. Je comprends l’Espérance qui gonfle ton cœur.

J’espère que les parents vont bientôt parler à A. [Alice Herrmann].

Ta mère affect.

Ta tante a reçu ta lettre. Tu aurais pu dire un mot de ce qu’oncle Axel a fait pour nous. Tu es a temps.

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1 Marcel Boudouresque (1862-1940), chanteur d’art lyrique (baryton-basse) marseillais.