lundi 23 juillet 2018

Ludres, 23 juillet 1918 – Jean à sa mère

23-7-18

Ma chère Maman

Nous avons décidement quitté ce secteur où nous avons passé quelques mois qui ne seront certes pas dans les plus durs de la guerre.

Avant-hier soir en guise d’adieu nous avons fait une bruyante retraite dans les rues d’E. [Einville]. C’était du délire. Tout le regiment suivait, et la moitié du village, les officiers en tête.

Je me trouvais tout à fait voisin de Lucien [Lucien Benoît, cousin germain de Jean]. Il avait demandé au colonel il y a quelques jours la permission de me garder 24 heures. C’est ce qui s’est fait. J’ai passé une très bonne journée avec lui. Tu ne peux croire ce qu’il a été gentil avec moi pendant ces sejours dans son armée. Je ne puis plus le croire indifferent. Il m’a donné cette photo de son fils [Pierre Benoît (1916-2001)] et d’Elna, prise sur la plage du diable. Ils font tous les deux la grimace mais j’ai été amusé de trouvé là-dessus Elna si grande fille.

Nous avons visité des services très interessants de l’Armée, nous nous sommes promenés au bord de la rivière. Le milieu dans lequel il vit est sympathique. C’est n’est deja plus ce que nous appelons la mentalité « Etat Major », son bureau s’occupe de materiel et de transport, et c’est le bureau du premier commerçant venu. Ce matin j’ai rejoint le regiment, j’ai trouvé le temps gris et le colonel d’une humeur massacrante.

Maintenant nous faisons les preparatifs du grand depart.

Je n’ai jamais vu arriver une periode agitée avec aussi peu d’aprehension. Le regiment est tout à fait en forme et les evenements sont faits pour nous donner bon courage. [Pierre] Péchenart ne se tient plus de joie depuis qu’il n’est plus des pays envahis et il espere bien retrouver son père parmis les 200 civils de Château-Thierry.

Bonne lettre de [Daniel] Loux.

Il me tarde de savoir q. chose de votre sejour dans la montagne.

Tendrement à toi
Jean