samedi 2 juillet 2016

Sommelonne, 2 juillet 1916 – Jean à sa mère

2-7-1916
            Maman cherie, 

            Je viens de recevoir tes mots des 24, 27 et 28. C’est un immense soulagement de te sentir enfin rassurée. Tu seras pourtant restée encore quelques jours sans nouvelles après ma carte du 21 ; tu sais que le soir du même jour nous sommes remontés pour 5 jours, qui ont été moins durs que les premiers, mais qui ns ont couté encore quelques hommes et de la fatigue.
            C’est terrible de penser que d’autres ont prit notre place et qu’on souffre et meurt toujours là bas. Hier nous avons fait dans la foret voisine une longue marche un peu fatigante. Aujourd’hui Dimanche c’est le repos ; et je passe les heures auprès de vous.
            T’ai-je parlé de mon nouvel ordonnance. L’ancien [Jean-Baptiste Lemaine], un de mes meilleurs soldats est mort là-haut. Celui-ci [Toussaint] est un phenomène, un peu tête brulée, levant facilement le coude ; mais dévoué comme un chien de berger ; abattant du travail comme un nègre et très attaché. Je n’ai jamais été aussi bien brossé, ciré, fourbi, lavé, décroté, etc. Je n’ai plus à bouger le petit doigt. J’ai donné son adresse à tante Fanny, qui me demandait des protégés. Je viens encore de recevoir d’elle un paquet et de l’argent. Mon tour de permission est encore lointain, très lointain. Mais comme je vais être cité, la citation donne droit à deux jours, qui generalement s’ajoutent à la permission, mais exceptionnellement peuvent faire une permission spéciale. Naturellement, je ferai l’impossible pour obtenir ce privilège.
Toujours très tendrement

Jean 

            Je n’ai pas encore reçu le costume et les souliers. Mais j’espère que ça ne tardera pas.