dimanche 17 juillet 2016

Sète, 17 juillet 1916 – Mathilde à son fils

Villa de Suède le 17 Juillet 1916 

            Mon bien aimé petit sous-lieutenant. C’est à ce moment même que je reçois ta carte du 12 me disant qu’il pleut toujours. Nous etouffons ici le siroco souffle affreusement mais dans notre bout de jardin c’est supportable.
            Par le même courrier n’ayant rien reçu hier j’ai ta lettre du 14 bien intéressante. Comme je voudrais être la première à te donner l’accolade ! Je suis contente bien contente pour toi à bien des points de vue. Du reste cela t’était du depuis longtemps mon grand chéri et tu vas avoir un peu de galette c’est ce que j’y vois de plus clair. Puis mon orgueil de mère y trouve son compte. Mais va si venue l’heure de la permission j’aurais été aussi fière de me pendre au bras de mon aspirant qu’a celui de mon  s-lieutenant. Le tout est d’avoir ton cher visage à embrasser, de pouvoir t’étreindre contre mon cœur.
            Je suis donc seule jusqu’à Mercredi. Je ne leur dirais qu’alors ta nomination. Je ne quitte « Na » que pour aller dîner chez tante Anna à côté, à la baraquette Frisch. Tante Jenny doit y être arrivée de ce matin ; pauvre femme comme il est dur de revenir dans un logis solitaire[1], sans bonne Isabelle ne revenant pas tante Anna l’a recueillie, jusqu’à ce que la maison soit en état.
            Je suis heureuse que tu restes au 132 dans ta Cie bien qu elle soit bouleversée. Cela doit te faire plaisir. Dès demain matin je t’enverrai de l’argent et tes souliers. J’ai  su trop tard ce soir pr aller à la banque chercher de l’argent, Hugo n’étant pas là.
            Ces lignes doivent partir. Comme je suis contente que tu sois un peu en fête. Qui est ton chef de Cie, n’est-il pas aimable ?
            Mille baisers de ta maman bien contente ce soir.

[1] Son mari, Charles Scheydt, était mort en décembre 1915.