Villa
Svéa ce 7 Novembre 1916
Mon cher enfant
Je suis infidèle, mais, je me
console en pensant que mes lettres te manquent moins entouré comme tu l’es par
tant d’amis.
Hier je n’ai pas écrit, parce que je
suis allée passer l’après-midi ou une partie tout au moins avec Mme
Gétaz, bien charmante femme admirable de force et d’énergie. Elle m’a lu ta
lettre et elle désire ardemment te voir, apprendre par toi ce que tu te
rappelles des conversations avec son fils. Elle sent que la guerre, la
souffrance ont révélé l’homme avec l’idéal qu’elle souhaitait qu’il eu ;
elle l’avait laissé un enfant et veut tout connaître de l’homme.
Son mari a voulu l’entrainer sur la
cote d’azur ; elle est partie ce matin je dois la prévenir de ta venue si
elle ne peut rentrer à Marseille pour te voir, elle viendra à Cette.
Elle veut surtout connaître celui
qui a été l’ami de son fils et elle croit que tu as eu sur lui une réelle influence.
Moi, je ne puis croire que je vais
peut être pouvoir embrasser le bien aimé de mon âme, et je n’ose me laisser
aller à l’idée de ce bonheur pr ne pas être trop anéantie si cela ne peut être.
Je suis encore ici au milieu d un
hôpital. Eliane [Houter,
une petite-nièce] est très malade bien
qu’il y ait une légère amélioration. Je la garderai cette nuit. Je t’attends et
t’espère ici.
Je sens que l’on m’attend
impatiemment à Cette, il me tarde d’y arriver avec toi.
Je t’embrasse de tout mon cœur.
Ta mère