Cette le 16/9 1917
Mon chéri
Cette belle et chaude journée du
Dimanche et fort avancée puisque tout dort dans la maison parents et enfants et
je ne peux pas aller prendre le repos bien désiré cependant sans venir à toi
que j’ai fort négligé aujourd’hui.
Cette après midi Ronlighed qui avait
déjeuné était encore là quand sont venues la dactylo d’Hugo [Marguerite
Gavaudan] avec sa mère [Rose Hille épouse Gavaudan] pr annoncer son mariage
avec le fils Cottalorda[1]
[Paul Cottalorda]. Ils sont fiancés depuis avant la guerre. Ce dernier a eu la
tête un peu dérangée par une forte commotion ; il va bien mais est un peu
febrile et on ne veut pas le pousser à bout en lui refusant le bonheur. Il
vient en permission et Hugo doit être témoin. Pendant que ces dames étaient là
tante Jeanne [Médard, ép. Beau] est arrivée. Cela ns a été une bonne surprise.
Elle a été fort affectueuse, toujours la même. Très émue en parlant de sa petite-fille
[Simone Beau, fille de son fils Maurice, tué aux Dardannelles le 2 mai 1915] qui
on le sent absorbe sa vie. Elle ne l’a pas en ce moment mais j’ai compris
qu’elle la garderait l’hiver et ne la donnerait plus qu’aux vacances. Elle fait
souffrir ta tante par ses réflexions douloureuses. Pourquoi Simone ne peut pas
dire papa et maman puisque ses petits amis le disent à quelqu’un. Pourquoi
Simone n’a jamais de petit frère ou de petite sœur ? et elle n’entend pas
la réponse. Elle s’écrie à sa grand-mère qui veut lui expliquer : Ne dis
pas Simone veut pas. Ta tante racontait cela les yeux remplis de larmes.
La décision de Loulou [Louis Beau][2]
leur coûte beaucoup mais elle ne veut pas aller contre. Elle venait en grande
partie féliciter Hugo car elle a l’air très heureuse de son geste [sa démission
du poste de consul de Suède] et voir Mr Pierrot qu’elle a trouvé
superbe.
Entrefilet paru dans "Le Journal" du 14 septembre 1917. Source : Gallica |
Je l’ai accompagnée à la gare elle m’a
dit alors que devant ces visites elle n’avait pas pu parler des affaires (car
il y avait aussi le capitaine Lelièvre) mais que tout était terminé et que Bourjade[3]
apporterait un de ces jours des pièces à signer et 46 000 frs ; notre
part[4].
Elle s’est chargée de ceux qui
n’avaient pas payé, de même qu’elle s’est arrangée avec Franck [Médard] voulant
que vs ayez l’argent liquide.
Ma lettre se ressent de mon sommeil.
Excuse moi.
Je me hâte ce matin de la fermer pr
qu’elle puisse partir. Pierrot n’est pas sage, il hurle à côté j’ai peine à
joindre deux idées.
Suzie commence à reprendre la vie de
tout le monde. Elle sortira la semaine prochaine.
Un bon gros tendre baiser de ta
maman.
As-tu su les fiançailles de [Henri]
Cazalis avec Melle [Geneviève] Lehr ?
La demission de ton beau-frère a
paru dans tous les journaux de la région. L’entrefilet que je joins à ces lignes
est celui de l Eclair[5]
très laconique car le journal est fort catholique et n’a pas même parlé
de la maison Busck qu’il n’aime pas.
Bien entendu Hugo n’a rien fait pr
que ce soit inséré partout et en a été ennuyé.
[1]
Mathilde écrit Cothalorda, mais il s’agit en fait de la famille Cottalorda. Le mariage
sera célébré le 2 août 1917.
[2]
La nature de cette décision est inconnue, même de Jean qui le signale dans une
lettre à venir du 22 septembre 1917.
[3] Mathilde
écrit ici Bourjade, et Bourgade dans sa lettre du 22 mai 1917. L’orthographe
est donc incertaine.
[4]
Il s’agit sûrement de l’héritage de Coralie Bérard veuve Médard (1835-1911), la
grand-mère paternelle de Jean. L’héritage devait être partagé entre Elise
Médard veuve Drouillon, Jeanne Médard épouse Beau, Frank Médard ; la part
de Pierre Médard (1860-1900) devait être partagée entre Jean et sa sœur
Suzanne.
[5] Le titre
complet du journal était « L’Eclair : journal quotidien du Midi ». A noter que cet entrefilet est également paru dans plusieurs journaux nationaux (avec le nom "Ekelund" souvent mal orthographié).