Cette le 11/9 1917
C’est de nouveau un grand silence de
trois jours, je trouve que tu deviens bien paresseux en ce qui me concerne et
j’use de « représailles ». Mais si j’ai peu de temps à te consacrer
je dois bien comprendre que ton temps à toi est plus pris encore.
Pierrot est moins sage depuis deux
jours. Sa maman a une telle abondance de lait qu’il en prend trop, sans doute,
alors il s’étouffe et lui cause des émotions terribles par cela même, et
connait aussi les coliques dont il n’avait pas encore souffert et aujourd’hui
il a donné un peu plus de mal. Cela parait d’autant plus extraordinaire qu’il
avait été jusque là un petit modèle d’enfant, comme on n’en voit pas.
A la une de "L'Echo de Paris" du 10 septembre 1917 Source : Gallica |
Suzie passe maintenant ses
après-midi sur la chaise longue à travailler et les forces reviennent vite. Ce
soir a été cependant pr elle une mauvaise soirée. Son mari a apporté de bien
tristes nouvelles concernant la Suède[1].
Il est très monté et sans autre réflexion a envoyé sa démission de consul avec
des paroles fort amères. Ns sommes obligés d’envisager les conséquences qui
peuvent être ennuyeuses si le conflit s’aggrave bien tristes même. Son acte
prouvera certainement ses sentiments pr la France mais sa situation change – il
n’aura plus les avantages que lui donnait le consulat et il prendra toutes les
charges du commerçant français. Cela est juste bien entendu et il est à souhaiter
que les évènements s’arrêtent là.
Ce soir j’ai du faire sortir Elna
quelques instants et ai rencontré Karin toute navrée. Elle dit ne plus oser se
montrer dans la rue. J’espère que le peuple Suédois va se défendre et que l’on
aura la certitude qu’il ne suit pas son gouvernement dans son infamie.
Hugo par son acte se ferme les
portes de la Suède, il n’y pourra plus aller, ni revoir ses parents et bien
qu’il ne l’avoue pas, je comprends qu’il en soit malheureux. Suzie paraissait
fort navrée ce soir.
Je t’écris ces mots avant de me
coucher n’étant pas du tout sure de pouvoir le faire demain matin. Au réveil je
suis prise par l’engrenage. Une joie qui est parfois mélangée d’énervement et
de fatigue, est de m’occuper entièrement d’Elna. C’est un rêve d’enfant, toute
maternelle avec ce petit frère bien aimé. Elle l’entoure de tant d’amour, de
soins touchants que l’on ne peut qu’en être ému.
Je joins à ma lettre celle de tante
Anna qui t’interessera. J’avais compris que Lucien [Benoît] avait demandé à
partir, je ne crois pas. C’est son colonel je pense qui l’a désigné comme un
officier.
Rudy [Busck] est parait-il à
Marseille en permission et Fanny encore en la Savoie ; je ne comprends pas
bien leurs arrangements.
Et toi mon petit que fais-tu ?
Je pense à toi avec toute ma tendresse passionnée.
Ta maman
Mon brave Lalouette m’apprend qu’il
a la croix de guerre. Je viens de lui envoyer 10 frs.
[1] La révélation d’une collusion entre les ambassadeurs allemands et suédois à Buenos-Aires (Argentine) a mis en cause la neutralité officielle de la Suède dans le conflit.
[1] La révélation d’une collusion entre les ambassadeurs allemands et suédois à Buenos-Aires (Argentine) a mis en cause la neutralité officielle de la Suède dans le conflit.