lundi 14 août 2017

Mittlach, 14 août 1917 – Jean à sa mère

14/8/17
            Maman chérie 

            Je m’aperçois que deux cartes écrites ces jours-ci ne sont pas parties ; tu seras ainsi restée quelque temps sans nouvelles et te sera peut-être inquiétée.
            Il me tarde de savoir où en sont tes névralgies. Ne te fais donc pas de soucis pour moi. Je suis assez grand garçon pour ne pas me priver d’un tricot ou d’une paire de chaussettes de laine si le besoin s’en fait sentir.
            Pour le moment il ne fait pas froid ; en mouvement même on a souvent très chaud, les côtes du pays surtout étant passablement raides. Si j’allume du feu de temps de temps, c’est beaucoup plus pour combattre l’humidité que le froid, nos demeures étant à moitié souterraines. Il m’arrive assez souvent de mettre mon costume de toile. Vie toujours la même.
            Par-ci par là, une promenade en ligne. On va très loin à mulet, puis, lorsqu’on est plus couvert par les bois, on met pied à terre et on prend les boyaux. Je vais beaucoup aux observatoires c’est très interessant, et puis toujours les papelards. De temps en temps une petite manifestation boche ou française mais jamais rien de grave. Hier je suis monté sur une côte voisine faire un peu de peinture. Ce n’est pas epatant.
 
Source : collections BDIC

            Bonne lettre de Suzon avec des photos où la petite n’est pas souriante, mais où elle est bien elle quand même. Elles me plaisent beaucoup. Une chanson de Bricotte Mourgue[1] sur le camp de Malons, qu’Alice a laissé à Suzon et qui est assez amusante.
Très tendrement 

Jean

[1] Jean écrit « Mourge », mais comme il est fâché avec les « ge » et les « gue », le patronyme est selon toute vraisemblance « Mourgue » ou « Mourgues ».