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Nous cantonnons dans la vallée de la Thür et d’abord
près de Wesserling, le berceau[1]
de la famille Leenhardt. Un de mes trisaïeuls [André Chrétien Leenhardt
(1744-1813)], à la fin de l’ancien régime, a dirigé là une usine où l’on
fabriquait de la toile imprimée. C’est un charmant séjour.
J’y retrouve mes deux professeurs Jean et Henri
Monnier. Ce sont des hommes avec lesquels je ne me sens jamais tout à fait à
mon aise, mais que j’estime et que j’aime. Jean est extrêmement original,
bizarre dans sa manière d’être, accompagnant ses paroles de gestes qui sont
toute une mimique. Henri, à la fois caustique et terriblement complimenteur,
dont je ne sais jamais s’il se fiche de moi ou s’il exagère naïvement les
qualités qu’il me prête, mais l’un et l’autre savants, cultivés, sérieux, surs.
Je fais la connaissance d’Albert Dartigue, qui
deviendra pour moi un ami et du duc de Trévise[2],
l’un et l’autre directeurs de foyers du soldat, des Jules Scheurer, qui me
reçoivent avec la plus grande gentillesse et chez qui je me sentirai en
parfaite confiance. Ils ont toujours été ardemment français. Ils ont perdu
leurs deux fils à la guerre [Daniel et Pierre], mais l’on trouve toujours chez
eux une hospitalité souriante. Lui, frère du Scheurer Koestner [Auguste
Scheurer-Kestner] de l’affaire Dreyfus[3],
industriel à Bitschwiller, est la personnalité civile la plus marquante de la
vallée.
Mémoires
de Jean Médard, 1970 (3ème partie : La guerre)
[1] Il est inexact de dire que Wesserling est le « berceau » de la famille Leenhardt. André-Chrétien Leenhardt (1744-1813), l’ancêtre de la branche française des Leenhardt, y a simplement vécu quelques années avant de faire souche à Montpellier. Il était né à Francfort-sur-le-Main.
[1] Il est inexact de dire que Wesserling est le « berceau » de la famille Leenhardt. André-Chrétien Leenhardt (1744-1813), l’ancêtre de la branche française des Leenhardt, y a simplement vécu quelques années avant de faire souche à Montpellier. Il était né à Francfort-sur-le-Main.
[2]
Titre créé en 1808 par Napoléon pour le maréchal Mortier. Edouard Mortier, duc
de Trévise (1883-1946), que Jean rencontre en Alsace à l’été 1917, était le 5ème
porteur du titre.
[3]
Auguste Scheurer-Kestner (1833-1899), industriel et homme politique (député,
puis sénateur et vice-président du Sénat). C’est à lui que Louis Leblois, ami
et avocat du colonel Picquart (officier du 2ème bureau, premier
convaincu de l’innocence de Dreyfus) choisit de communiquer les preuves réunies
par Picquart. Peu à peu, se constitue un groupe qui va défendre l’innocence de
Dreyfus.