lundi 21 décembre 2015

Châtelaudren, 21 décembre 1915 – Jean à sa mère

Châtelaudren 21-12-15
            Maman cherie 

            C’est avec le cœur bien gros que je t’ai envoyé ma dépèche de ce matin. La journée d’aujourd’hui t’aura apporté comme à moi une grosse deception. Oui, j’étais presque sur de cette permission qui me permettrait de passer avec vous la veille de Noël, et elle m’a été refusée. Voilà pourquoi. On a donné des permissions de 4 jours par serie 21 Dec.-24. 25-28. 30-2 Janvier. 3-6 Janvier. Comme aucune série ne me permettait de passer à Cette le 24, j’ai demandé une permission entre series, croyant que pour un gradé il n’y aurait pas de difficultés. Le commandant a refusé de la signer. J’en suis quitte pour demander une permission normale, la serie 25-28. Mais si on ne m’autorise pas à prendre le train du matin le 24, j’arriverai à Cette le 26 à 7 heures (au lieu du 25 à 11 heures) et repartirai le lendemain soir 27. Je trouve que ça vaut encore la peine. Qui sait quand nous nous reverrons autrement ?
            Tout ça bien entendu si je ne suis pas parti pour le front d’ici là.
            Si tu trouves que ce n’est pas raisonnable de venir à Cette pour si peu de temps, telegraphie moi ici jusqu’au 24. A Paris (Faculté 83 bd Arago) à partir du 24 au soir.
            Je suis fatigué ce soir, je vous embrasse tous bien tendrement et pense avec tristesse à cette Noël que je passerai encore loin de vous, mais près de vous par le cœur, et, peut-être, en route pour vous retrouver. 

Jean 

            J’espère pouvoir raconter de vive-voix ma belle journée de Dimanche à Perros-Guirec.